L’ Afrique et les promesses non tenues des transitions démocratiques : une conférence publique pose le débat à Lomé
Lancée au début des années 1990, la transition des pays africains vers la démocratie et l’état de droit n’a pas abouti. Qu’est-ce qui s’est passé et qu’est-ce qui justifie cet échec aujourd’hui d’autant que l’Afrique est de plus en plus sous le feu de l’actualité mondiale à cause de la récurrence de la prise de pouvoir par la force.
C’est à cette question qu’a essayé de répondre la conférence publique de la rentrée diplomatique 2023-2024 présidée par Prof. Robert Dussey, ministre des affaires étrangères, de l’intégration régionale et des Togolais de l’extérieur ce 11 septembre 2023 à Lomé. Ont pris part à cet événement le corps diplomatique et consulaire accrédité au Togo, des personnalités politiques, des universitaires, des acteurs du monde de la justice, de la société civile et des journalistes.
Déclinant les objectifs de ce rendez-vous annuel, le ministre Dussey a rappeler les orientations stratégiques de la diplomatie togolaise définies par le chef de l’Etat, Faure Essozimna Gnassingbé, relatives, entre autres, à l’engagement au service d’une communauté ouest-africaine pacifique, d’une Afrique moins vulnérable aux chocs, stable, forte et audible sur la scène internationale et pour un monde plus juste et équitable. « Le Togo ne peut abandonner les pays frères qui sont en crise, en guerre et en transition politique qui constituent des moments d’incertitudes majeures et les efforts de médiation et de facilitations à l’échelle de la région et du continent seront renforcés tout au long de l’année. La diplomatie togolaise valorise l’expertise africaine dans la recherche de solutions aux problèmes africains et c’est la meilleure façon pour l’Afrique de limiter les ingérences extérieures qui ont contribué ces dernières années à attiser les foyers de tensions et à mettre le continent en difficulté », a-t-il déclaré.
Pour Me Joseph Kokou Koffigoh, Ancien Premier ministre de la transition au Togo de 1991 à 1994 qui a animé la conférence inaugurale de cette rentrée diplomatique, nul doute que les transitions des années 90 voulaient concrétiser un rêve, celui de l’ état de droit et de la démocratie.
Présentant sa vision des transitions démocratiques en Afrique qui, de son avis sont à la fois des occasions d’espoirs, d’incertitudes et parfois de désespoir, l’orateur a fait valoir qu’elles ne sont pas toujours des occasions faciles où les espoirs deviennent des réalités. « Le grand mérite des transitions démocratiques des années 90 en Afrique, outre la libéralisation des paysages politiques et les avancées en matière des droits de l’homme, c’est que tout le monde s’est converti à l’idée de démocratie qui est définitivement ancrée dans les mœurs. Les transitions démocratiques ont donc fait de la démocratie pluraliste le régime politique accepté par tous », a-t-il souligné. Aux dires du conférencier, quelques unes des raisons du « piétinement » des transitions démocratiques en Afrique viennent du fait qu’elles ne sont pas pour la plupart inclusives, pacifiques et orientées vers la restauration de l’ordre constitutionnel à travers des élections libres et transparentes. Se fondant sur des expériences passées, il a relever que la conduite et l’accompagnement des transitions politiques demandent plus de réalisme, de pragmatisme et d’approches contextualisées et adaptées à la situation pratique de chaque processus de transition politique. Il a invité les organisations régionales, l’union africaine et la communauté internationale à sortir des sentiers battus et des positions purement normatives afin de se mettre en capacité de mieux accompagner les transitions politiques en cours sur le continent, notamment en Afrique de l’ouest. « Ces institutions de la communauté internationale doivent privilégier les voies et les mécanismes de diplomatie dans leurs relations avec les régimes de transition au détriment des approches belligérantes », analyse t-il pour finir.
Notons que cette cérémonie donne ainsi le ton aux principaux événements qui sont à l’agenda diplomatique du Togo au cours de l’année diplomatique 2023-2024, notamment la tenue les 21et 22 octobre prochains de la première édition de « Lomé Peace and security Forum » et l’organisation du 9 ème congrès Panafricain au second semestre de l’année 2024.
La Rédaction